Le C.I.R.A , Centre Indépendant de Recherche Artistique, est un laboratoire consacré à la recherche fondamentale artistique depuis 2015. Ce projet consiste en des résidences d’artistes locaux et internationaux via la mise à disposition d’un espace original (une île sauvage au milieu du fleuve Loire au coeur de la ville d'Orléans), d'un lieu d'accueil et d’une bourse de recherche.
Il accueille des artistes de tous les arts vivants et plastiques, y compris photographie et architecture.
Il accueille également des techniciens au service des arts qui veulent faire progresser le service rendu aux artistes.
Il a pour modèle l’académie de France à Rome (Villa Médicis)
La Recherche est au coeur de l'activité humaine. Elle redéfinit en permanence les contours du savoir, façonne les courants de pensée, irrigue la société.
"J'aime mieux forger mon âme que la meubler" ( "Essais" de Montaigne)
Les laborantins
Depuis 2015, 15 laborantins artistiques ont été accueillis au sein du C.I.R.A :
A l'issue de leurs recherches, Isabelle Buyse et Cécile Fleur Dabo ont obtenu la distinction de Docteur Honoris Causa du C.I.R.A.
Le lieu de recherche proposé aux laborantins du C.I.R.A, est une île du fleuve Loire, et son environnement, au coeur d'un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO®, à Orléans.
EN 2024, Scarlet Tison est la 15è laborantine du CIRA
PORTRAIT DES LABORANTINS (2015-2023)
Cécile Fleur Dabo (2015)
Docteur Honoris Causa du C.I.R.A
Le travail de DABO Cécile f., se caractérise globalement par une absence de narration et la simple volonté d’investir des durées sur des modes poétiques, à travers différents mediums, mais principalement par les musiques qu’elle produit, les images vidéographiques, son propre corps, et des installations plus ou moins éphémères, qui lient le corps et la musique (et plus largement le son), dans un rapport pictural avec l’image. Le cadre et la planéité sont omniprésents et l’emploi de la vidéo est une constante dans cette optique.
Ainsi malgré les mouvements (dûs au concourts du temps et de l'espace), chaque travail peut être nommé un "tableau" ou considéré comme un triptique ou une série (par exemple) en analogie à une pratique picturale.
Traitant de corps, de temps et d’espace, les notions de perception et de subjectivité sont inévitables, et dans ce cas, souhaitées. Le rapport à l’œuvre se veut résolument sensible, comme au cœur d’un propos indicible. Propos qui ne se situe pas tant dans les formes elles-mêmes que dans leurs relations, interactions, juxtapositions… Le « spectateur » est sollicité ; c’est lui qui actualise, qui saisit ces intervalles qui fondent le(s) sens.
La performance se veut comme une extension logique de son propos « vivre l’œuvre, créer des relations, sensiblement, des poèmes synesthésiques… »
Isabelle Buyse (2016)
Docteur Honoris Causa du C.I.R.A
Artiste du mouvement terrestre et aérien, exploratrice de formes expressives contemporaines Je suis née en 1982 dans les montagnes des Alpes Maritimes, j'ai grandi en pleine nature,
cette empreinte demeure, base d'inspiration.
Haute comme six pommes j'ai découvert les arts du cirque enseignés dans une dimension
nouvelle, non pas comme une performance technique mais comme un espace d'expression
habité.
Sous la direction d'Alain Vétillard, lui même formé à l'école Marcel Marceau et Jacques Lecoq (Paris), j'ai découvert le théâtre gestuel et jonglé, le mime, le jeu d'acteur en
parallèle de l'acrobatie, équilibre, manipulation d'objets…
Je suivrai également différents cours et stages en danse contemporaine, théâtre, danse voltige, musique et chant.
En 2000 j'ai intégré la compagnie Zuzurelone (06) pour la création d'un spectacle gestuel,
acrobatique et jonglé ainsi que pour des commandes de créations ponctuelles.
En 2002 je pose mes valises dans le Pays de la Meije (05), à 1800 mètres d'altitude, face aux
glaciers et montagnes majestueuses. Mon quotidien est nourri de contemplation, de l'influence des éléments, du passage des saisons. Je m'imprègne d'une autre réalité.
Je continue les formations professionnelles, stages et cours en danse aérienne, danse sensitive
et contemporaine, tango, clown, théâtre vocal et chorégraphique.
En 2009 l'élan créatif refait surface, comme une évidence. Il se teinte de ces sensations
amassées, de l'influence des sommets enneigés et des torrents printaniers. Danse, cirque nouveau, musique vivante en mélange, la recherche et la création se vit alors
dehors, sur une place de village, en haut d'une colline, dans une grange, pour que
l'environnement soit partie intégrante de la matière explorée.
En 2011 le geste artistique rencontre l'alpinisme, le mouvement s'élève alors suspendu à la cime
d'un arbre, sur une falaise, entre les roches.
Trouver la poésie dans l'espace aérien, entre terre et ciel.
Depuis 2014/2015 mes aspirations me portent vers des réalisations contemporaines éphémères,
des créations naissant d'une rencontre et s’inscrivant dans l'ultime nécessité d'inviter
l'humain à poser un regard différent, sur la terre, les hommes ou les choses afin d'enrichir l'expérience individuelle ou collective de la vie.
Je chéri le mot « synchronicité » dont une des définition est :
l'occurrence simultanée d'au moins deux événements qui ne présentent pas de lien de causalité, mais dont l'association prend un sens pour la personne qui les perçoit.
Lien vers le mémoire de la laborantine :
Laurent Bauby (2017)
Jeune artiste photographe, d' Orléans métropole
Théo Jouanneau (2017)
Théo Jouanneau, jeune artiste d'Orléans du théâtre :
"Mon visage s'efface au trouble de vos mains de sculpteur avides de chair.
J'ai dans la peau un peu de cette cire qu'on les statues.
Profanée par les proférations de vos mains indécises.
Brûler cette seconde peau serait être maître de ma naissance et non subir le joug d'exécrables religions qui font de vous les martyrs d'un artifice sans vergogne.
Respirer enfin.
Brûler pour vivre.
Lavé de mes démons , j'offrirais aux yeux des profanes autre chose qu'un acte religieux.
Je veux brûler les mains qui m'ont faites.
Je veux ternir vos jours pour laisser place au sépulcre de mes intestins pliés aux mensonges.
Cracher d'un feu de soie l'immensité d'un jour neuf.
Sans bondir dans la non chalance de l'être exhaustif.
Bâtir de mes propres mains l'archange du réveil du funambule de plomb qui sommeille dans ma peau d'aristocrate des sentiments lourds de chagrin.
Batir l'humilité sur le toit de mes ancêtres et faire de la charité un temple pour les pauvres."
Mémoire artistique du laborantin :
Aurélien Mussard (2017)
Né en 1984 à Blois, Aurélien Mussard passe son enfance en Alsace où il se passionne très tôt pour les films d’action et de Kung-fu. Dès l’âge de six ans, il commence à pratiquer les sports de combats. Il s’initie au kick boxing avec son oncle, puis enchaîne avec la boxe thaïlandaise qu'il pratiquera jusqu’à l’adolescence. C'est aujourd'hui encore son art martial de prédilection. Il apprend entre temps la manipulation des armes, katana, nunchaku et bâton, et s’essaye à d'autres arts martiaux tels que le Kung-fu Wushu et l’Aïkido. Il pratique aussi le combat de rue et s'entraîne au MMA.
Il s’engage rapidement chez les parachutistes dans l’Armée de l’air, puis un an plus tard part dans les troupes de Marine de l’Armée de terre. Après cette expérience enrichissante, il retourne à sa passion première, et suite à un casting devient cascadeur au Parc Asterix où il restera trois ans. Sa passion grandissante pour l’acrobatie au sol le porte jusqu'à l’Institut national d’Acrobatie où son professeur Marc Battistel lui enseigne l’art de l’acrobatie de Cirque au sol, la cascade acrobatique et le Kung-fu. Il devient artiste de Cirque et il est engagé au Cirque Medrano où il se produit avec un numéro en Trio.
Il fait quelques figurations au cinéma, notamment dans « Le Clan Pasquier », « Louis la Brocante » et « Interpol », puis il intégre l’équipe lyonnaise de cascadeurs de Stéphane Margot et participe à son premier film en tant que cascadeur sur « Les Lyonnais » d’Olivier Marchal.
En 2010, il rencontre la créatrice des Deschiens Macha Makeieff, qui l'engage pour sa production des « Mamelles de Tirésias » de Francis Poulenc à l’Opéra national de Lyon et à l’Opéra Comique de Paris. Ce spectacle a été diffusé en direct sur Mezzo, puis rediffusé à plusieurs reprises sur France 2.
La même année, il joue dans la « Vera Costanza » de Haydn, repris par Elio De Capitani à l’Opéra de Saint-Etienne.
Il se produit aussi au Gala « Antwerp Diamond Conference » à Enver avec Colin Powell ; dans « Douce et Barbe-bleu » d’Isabelle Aboulker, mis en scène par Jean-Romain Vesperini, à l’Opéra national de Lyon ; dans « Le nez » de Dimitri Chostakovitch, mis en scène par William Kentridge, au Festival international d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence ; et dans « Le Barbier de Séville », mis en scène par Jean-Romain Vesperini, et « les nuits de Bel Canto » au Festival de Corte en Corse.
Sa collaboration avec Macha Makeïeff se poursuit en 2011 et 2012 avec « Les Apaches » joué au Théâtre national de la Criée, au Théâtre national de Bordeaux, à la MC93 Bobigny, à la Maison des Arts de Créteil et en tournée ; et en 2013 et 2014 avec « Ali baba », aux côtés du comédien Atmen Kelif, du danseur iranien Shahrokh Moshkin Ghalam et du ténor Thomas Morris, au Théâtre national de Chaillot, au TNP-Villeurbanne, au Théâtre national de la Criée, au Théâtre national de Nice et en tournée.
Il participe aussi au tournage de la série de 40 courts-métrages « Ali Baba Marseille », réalisés par Macha Makeïeff et Marie Mandy pour Arte, et désormais disponibles en DVD.
Il s'est récemment formé à la Capoeira, à la danse, aux sangles aériennes et au mât chinois à l'Ecole nationale du Cirque de Chatellerault, et a repris le Kaisendo, un des arts martiaux de self-defense les plus complets.
En 2015, il joue en tournée aux côtés du célèbre danseur iranien Sharokh Moshkim Ghalam, et monte un duo de sangles aériennes et de portée acrobatique basé sur l’Acro-danse avec sa nouvelle partenaire Lucile Triay.
Lucile Triay (2017)
Née en 1993 à Drancy, Lucile Triay passe son enfance à Sigean où elle découvre les arts du cirque à l’ école de cirque Estella-Circus .
Émerveillée par ce métier depuis son enfance, elle décide d'entrer en école amateur à l’âge de 12 ans.
Elle découvre alors que le cirque est plus qu’un loisir mais plutôt une vocation.
Elle commence par apprendre le trapèze fixe, puis elle deviendra bénévole au sein de
son école amateur pour y enseigner l’année suivante, cette année lui a permis de pouvoir être formée.
Elle enseigne à des enfants entre 4 à 19ans toutes les disciplines du cirque en passant par de l’éveil jusqu’ aux disciplines qu’ils ont choisies.
Elle continue de se former en faisant différents stages d’acrobatie.
En 2013, après un concours d'entrée elle intègre l’école «Arc en cirque» située à Chambéry en Savoie.
Elle y apprend les Sangles aériennes qui deviennent sa discipline principale.
Cette année-là elle y rencontre Aurélien Mussard, Artiste acrobate qui lui propose de la former aux arts du cirque et de collaborer pour faire un duo de sangles aériennes ainsi que des projets d'acro-danse et porté acrobatique.
Elle travaille aujourd'hui en tant qu' artiste de rue au sein de la compagnie L’ échappée cirk.
En 2015 elle joue au festival d’Aurillac avec son partenaire en sangles aériennes, acrobaties au sol et acro-danse sur le spectacle « Et voilà » , création de plusieurs artistes jouant pour le plaisir de montrer leurs arts au spectateur.
Lucile continue de se former avec son partenaire et prévoit très prochainement plusieurs résidences d'artiste. ]
Armelle Taillandier (2017)
Armelle Taillandier
"Feutre encré ou pinceau en main, je joue aussi bien avec les traits, les stylos, qu’avec les mots ! Depuis quelques mois, vous avez peut-être eu l’occasion de rencontrer mes poissons de la « Pêche du jour » ! Je participe également depuis le début au Cacograph, publication « textopicturale » d'illustrateurs-graphistes-écrivains orléanais d'un soir.
En décembre 2017, je suis la laborantine du Cira (Centre Indépendant de Recherche Artistique)."
Franziska Junker (2019)
Aymeric Vercier (2019)
Tentative de discerner ce que je viens chercher au C.I.R.A.
Je suis Aymeric Vercier, je vis à Orléans et je viens d'ailleurs, en me faisant laborantin ce mois de juillet je me sens équilibriste. Je me sens entre-deux et dans l'entre-deux il faut creuser, questionner et vivre pour y trouver sa place. Cette posture 'en équilibre' induit aussi une forme de vérité, que tout est éphémère, de passage, que le vivant est mouvant et émerge souvent de situations précaires et inconfortables.
Poser des questions à ce qui fait notre milieu, le tester, l'observer, le comprendre et apercevoir en lui son propre reflet c'est ce qui m'anime.
C'est une recherche de positionnement vis-à-vis de ce qui est.
C'est une recherche qui tend à explorer et mettre en place une méthodologie et des outils nécessaires pour approcher ce mot aux mille formes : 'habiter'
Mes formations me donnent la possibilité de m'approprier plusieurs dénominations ; menuisier, designer, plasticien. Cela décline autant de visions du monde différentes, d'un entremêlement de technique et d'imaginaire, de point de vue globale et ponctuel ou encore de pensée rationnel et poétique. Quel équilibre émerge de ces différents points d'appuis ?
Daniel Van De Velde (2020)
DANIEL VAN DE VELDE –
Prélude
Bonjour.
Bonjour.
Qu'est-ce que vous faites ?
O pas grand chose, je creuse un tronc.
Pourquoi ?
Peut-être pour savoir de quel bois il est fait.
Et alors ?
Alors une fois entièrement creusé, évidé, il est sans bois en fait.
Comment cela ?
Et bien disons qu'un arbre n'est pas de bois. Il est debout ou bien couché mais en fait il n'est pas de bois. C'est nous qui projetons le bois en lui, une fois qu'on l'a abattu.
Vous l'avez abattu cet arbre ?
Non je l'ai pêcher quelque part en aval, dans la Loire.
Pêcher ?
Bah oui, apparemment il est tombé dans le fleuve. Apparemment une tempête.
Et vous faites ça souvent pêcher des troncs ?
Disons que ça m'arrive de temps en temps. Et vous vous faites quoi ici ?
On m'a dit qu'il y avait des artistes qui faisaient des trucs.
Ah oui. J'en ai entendu parler.
Vous êtes un de ces artistes, non ?
Oui, je suis artiste.
Ce tronc c'est pour faire une œuvre ?
Je pense oui.
Pourquoi vous le creuser.
Disons que je voulais voir comment c'est à l'intérieur d'un tronc.
Et alors ?
Bah c'est creux. Mais c'est un creux qui laisse passer la lumière. Et je crois qu'elle aime ça la lumière de se glisser à l'intérieur de ce tronc. Vous voyez ce que je laisse à ce peuplier...
C'est un peuplier ?
Oui. Je lui laisse les cinq derniers cernes de croissance. Vous connaissez l'histoire des cernes annuels de croissance ?
Bien sûr.
Alors voilà, après l'avoir remonté sur la berge, l'avoir débité en morceaux de cinquante centimètres, je le creuse pour mettre à jour les cinq derniers cernes de croissance.
Et après ?
Une fois que j'ai creusé l'ensemble des tronçons, je les assemble pour retrouver la forme initiale du tronc. Je le fais en laissant un vide de six centimètres entre chaque tronçon. Et après je chercher un endroit sur l'île pour le suspendre. Vous n'auriez pas une idée ?
Qu'est-ce que vous voulez dire ?
Et bien sur l'endroit où je pourrais suspendre ce tronc.
Vous êtes à court d'idées.
Non pas forcément.
Alors pourquoi vous me demandez ?
J'aime bien quand on échange des idées.
Je veux bien essayer d'y réfléchir. Ce vélo là, il est à vous ?
Plus ou moins.
Il n'a pas l'air en forme.
Non effectivement, je l'ai retrouvé ensablé dans la Loire.
Vous allez le remettre en état ?
J'aimerai bien oui.
Ça risque d'être compliqué.
Oui mais avec un peu de bonne volonté...
Interférence Orléanaise par Daniel Van de Velde
Cira
Interférences orléanaises 1 : Prendre ses marques.
Orléans. Un jardin. Un arbre élagué. Une tortue taiseuse. En guise de communication, elle fait
bruisser les feuilles mortes sous lesquelles elle se cache. Je ne comprends pas encore le langage
morse d’une tortue corse, duchesse des Duits. Je vais apprendre. Je sais seulement que l’animal me
parle de toutes ces plantes qu’elle affectionne, ralentisseuses de vie, quitte pour cela à redevenir de
simples graines qui se rétractent vers de nouveaux paysages de vie. C’est une tortue corse issue
d’une lignée insulaire allant de la Corse septentrionale jusqu’à l’île des Duits, sise en plein coeur
d’Orléans, au milieu de la Loire. Une longue migration transgénérationnelle, effectuée sous et à
travers terre. Pour ce faire, les tortues profitaient de la présence des taupes, de leur art de concevoir
des tunnels. Rien que pour cet exploit, cette lignée de tortue a été anoblie en 1839. Un nom à
particule que notre tortue arbore dans le graphisme géométrique de sa carapace. Pour l’instant nous
partageons un jardin, elle confinée dans son tas de feuilles, moi sous une tonnelle où j’amorce un
dialogue avec des bouts de bois qui émanent d’un lilas. Je les absorbe lentement, très lentement. La
masse musculaire de mon corps se met au diapason de la chaleur caniculaire environnante. Je
deviens une île au milieu d’un jardin. Je creuse un lilas partiellement élagué au bois dur comme du
buis, dur comme de l’amandier. Je le fais à l’ombre, à la fraîche loin de la cathédrale, de Jeanne
d’Arc, des boutiques.
Interférences orléanaises 2 : Redevenir blaireau.
Ce soir, je redeviens blaireau, loutre pour traverser la Loire et me métamorphoser en résident
intérimaire de l’île aux Duits. Je me débarrasserai de ma propre carapace. Je serai nu et fluide, et
j’aurai la tronche d’une de ces splendides gargouilles qui agrémentent la cathédrale au nord-est de
l’édifice. Je serai lent, idiot et effervescent à la fois. Plus je m’en éloigne plus ma carapace délaissée
s’amenuise. Une carapace vieille de plus de cent-mille ans. Elle m’a été utile pour vivre au ras du
sol et résister aux effondrements, aux éboulements, aux pas lourds de mastodontes qui ont
longtemps dominé en taille la longue chaîne du règne animal. Quatre pattes et un corps qui s’élance
pour donner racines à un cou qui serpente dans les hauteurs. Au bout de ce cou, une tête cligne, la
gueule entrebâillée pour se nourrir aux plus hautes branches des arbres. Des feuilles caduques, qui
au fur et à mesure de leur chute, conduisent la gueule vers le sol. De leur queue à leur tête, un jeu
d’osselets aboutés dont la cartographie singulière reprend celle d’un duits qui serpente au milieu de
la Loire. Ma carapace s’est retournée, elle flotte désormais au fil de la Loire, se heurtant à tout ce
qu’elle rencontre de plus ou moins solide.
Interférences orléanaises 3 : Épicentre du vivant.
J’ai appris hier que la carapace était devenue, le temps d’un colloque, l’amphithéâtre d’une
communauté de bernard-l’hermite savants. Le thème du colloque : « redevenir l’épicentre du
vivant ».
Je creuse, j’écris, me déleste de tout ce qui m’alourdit, entre autre pour redevenir à ma manière, un
épicentre du vivant.
Interférences orléanaises 4 : Présage de brume.
La petite algonquine, née en 2064, continue de m'envoyer des messages, elle me visite
régulièrement. Elle prend forme pour l'instant d'une pierre dans une rivière. Une pierre qui tient
dans ma main quand je lâche-prise. La rivière est un fleuve et le fleuve amorce la continuité
géographique des mers. Je ne sais sur quel rivage et par quel tangage cette pierre s'ouvrira en deux,
corne de vie, présage de brume.
Interférences orléanaises 5 : Une époque de manque.
Elle est ma soeur des étoiles. Une même matrice nous ressource et nous oriente. Je ferme les yeux.
Je la rejoins là où elle n’est pas encore. J’ai lieu avec elle. J’ai lieu sans elle. On se côtoie, on
s’abandonne. Ici la Loire, ailleurs l’Argens. La Loire, des rivières dans un fleuve. L’Argens, un
fleuve dans une rivière. Parfois les berges capitulent, parfois elles se contentent d’accompagner le
courant, nos pas, l’amorce d’un rire et la caresse d’une branche. Il fait chaud, inutilement chaud.
J’erre d’une fin d’époque aux soubassements d’époques à venir. Quand tout redeviendra pluriel sur
terre.
Interférences orléanaises 6 : L’addition.
J’ai dîné avec Snakta Loun Ilfa, l’esprit de la mutation des paysages, dans un fast-food halal au
centre d’Orléans. Elle non-mangeait ce que j’absorbais. Quand je fermais les yeux, je voyais
Algonquina. Quand je les ouvrais, je voyais à travers Snakta Loun Ilfa, des paysages en cours.
J’entendais le bruit d’un cours d’eau dans une friche des temps futurs.
- Le futur, parce qu’il est rusé, quand il nous convoque, le fait sous forme de friche. Tu entends
l’appel d’Algonquina, n’est-ce-pas ?
- Oui Snakta Loun, je l’entends.
- Tu dois savoir que pour l’instant, Algonquina est tout entière contenue dans un petit caillou pris
dans un cours d’eau qui traverse une friche.
- Arrête de me désirer.
- Oui Snakta Loun, j’arrête de te désirer.
- Continue de me désirer.
- Oui, je continue de te désirer.
- Je suis Ilfa.
- Je sais.
- Et toi , tu es qui ?
- Je ne sais pas.
- Qu’est-ce que tu sais de moi ?
- Ce que tu sais de moi.
- Tu continues de ramasser des pierres dans les fleuves et les rivières ?
- Oui, je continue.
- Et tu continues de remettre ces mêmes pierres dans les fleuves, les rivières et autres cours d’eau
une fois qu’elles t’ont communiqué ce qu’elles avaient à te communiquer ?
- Oui, je continue ça aussi.
- Algonquina t’a choisi parce que tu es né sous le double signe de l’ours et du faucon.
- J’ai toujours fait attention à ne pas griffer les cailloux et les pierres que je récupère. Je me contente
de les écouter.
- qui entend les rumeurs des pierres, entend ce qui est à la source de notre univers.
- L’addition s’il-vous-plait.
Interférences orléanaises 7 : Les Kalips.
Les Kalips sont de minuscules esprits qui ne pensent à rien. Ils s’interposent sans interférer avec ce
qui gouverne nos vies. Ils communiquent entre eux par le vide qui les maintient parmi nous. Ils
n’entendent pas le langage parlé. Ils ne se lassent pas de ce spectacle des lèvres de celles et ceux
qui ne déparlent pas. We tried to catch one of them, but it is unpossible. Ils errent parmi nous.
Contagieux, ils font germer des graines de nomadisme en chacun de nous
Joël Thépault (2021)
Joël Thépault, qui est venu oeuvrer à 3 éditions de la Fête des Duits - Rafraîchissements Artistiques, a émis le désir d’une immersion plus longue au milieu de la Loire, afin de profiter pleinement du potentiel naturel de l’environnement du fleuve à Orléans.
Sculpteur, scénographe, installateur, ethnographe, proche de la nature, il questionne le monde à chacune de ses créations.
Il manie les éléments avec pertinence.
L’association Nanoprod désire lui faire profiter d’une résidence au C.I.R.A pour sa recherche fondamentale et plus tard pour les citoyens Orléanais
Axel Roumy (2023)
artiste plasticien multi-sensoriel français, travaille sur l'éveil de nos sens & nous incite à ne pas contempler uniquement la réalité à travers le filtre de notre expérience visuelle, mais à avoir confiance en tous nos sens.
Mémoire du laborantin :
Seza Querrien (2023)
art thérapeute, plasticienne, peintre, marionnettiste, créatrice de lieu culturel, couturière.
Vincent Fonf (2023)
plasticien, sculpteur, peintre, photographe, metteur en scène, décorateur, créateur de lieu culturel
Scarlet Tison (2024)
Chorégraphe, Danceuse
Docteur Honoris Causa du C.I.R.A